Pour prolonger la réflexion précédente, je vous invite à découvrir une étude de Maître MRABET publiée dans la revue juridique canadienne Thémis. Cette étude s’intitule « Les comportements opportunistes du franchiseur ».
Vous pouvez la consulter sur le site des Editions Thémis.
Voici le résumé de cette étude :
Le rapport contractuel né du contrat de franchise est empreint par un déséquilibre manifeste entre les prestations réciproques des parties issu de la position économiquement dominante du franchiseur. Ce dernier sera à même de fixer unilatéralement le contenu contractuel, de sorte à diminuer ses obligations tout en élargissant le champ de ses droits.
Surgit alors tout un pan de comportements opportunistes du franchiseur se traduisant, notamment, par des abus au détriment du franchisé qui ne peut qu’acquiescer à la volonté de son partenaire. En effet, l’étude du droit civil révèle que les systèmes civilistes reposent sur une conception libérale du contrat permettant de présumer que les parties sont capables de défendre leurs intérêts.
En vertu de la théorie de l’autonomie de la volonté, le contrat est présumé être conforme aux intérêts respectifs des parties. À défaut de tout vice de consentement, le contrat ne peut qu’être équilibré. Cependant, s’il se trouve que le contrat est malgré tout déséquilibré, le droit civil, à moins de circonstances exceptionnelles, n’y pourra rien. La lésion ne vicie pas les conventions conclues entre majeurs non protégés, et la théorie de l’imprévision est rejetée par la plupart des systèmes civilistes.
L’indifférence du droit civil face à ce déséquilibre se justifie essentiellement par deux impératifs : la liberté contractuelle et la sécurité juridique.
Le principe de la force obligatoire du contrat s’impose aux parties autant qu’au juge et, partant, exclut toute tentative du juge de réviser un contrat déséquilibré. Toutefois, devant cette indifférence et cet immobilisme de la loi, le droit a, depuis, énormément évolué dans le sens d’apporter une protection plus accrue à la partie la plus faible au contrat.
À ce titre, nous assistons aujourd’hui à une double intervention plus réaliste : l’intervention du juge et celle du législateur (particulièrement dans les contrats d’adhésion). D’abord, le juge manifeste une volonté irréprochable de corriger des déséquilibres contractuels choquants, notamment en présence de clauses contractuelles manifestement abusives, et ce au regard des exigences d’une justice contractuelle basée sur la bonne foi des parties et l’exigence d’agir raisonnablement. Ensuite, par l’élaboration de droits spéciaux ayant pour finalité la protection de la partie la plus faible, le législateur instaure des règles impératives destinées à condamner les éventuels déséquilibres contractuels.
Ce souci de protection justifie l’atteinte ainsi portée au principe de la force obligatoire du contrat. Aussi, le postulat de Fouillée se voit inversé par Lacordaire qui souligne pertinemment que « entre le fort et le faible, c’est la liberté qui asservit et la loi qui libère ».
En somme, la protection du franchisé appelle au glissement du rapport contractuel d’un rapport conflictuel vers un rapport de coopération et, notamment, par la reconnaissance du concept de solidarisme contractuel.
Néanmoins, une telle démarche n’est pas sans troubler l’ordre normal de l’idée classique du contrat. D’une part, l’introduction d’obligations implicites au contrat renie en quelque sorte l’idée traditionnelle qu’on a des obligations contractuelles basée sur la commune intention des parties, et d’autre part, elle appelle à la reconsidération, par les systèmes civilistes, de la théorie de l’imprévision comme le suggère le droit uniforme et notamment le Guide D’UNIDROIT sur les accords internationaux de franchise principale, mais aussi les Principes d’UNIDROIT relatifs aux contrats du commerce international.